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978

Pascal Matthey (La 5e Couche, 2013) – 46 pages – 200 X 290 mm – quadrichromie – 9782930356945

978 est une bande dessinée concrète qui prend la forme du standard industriel de la bande dessinée francobelge, le 48 pages cartonné couleur, pour une raison simple : il en est entièrement constitué. Matthey a découpé, en de multiples fragments, des catalogues de bande dessinée au point de rendre les images originelles presque méconnaissables, jusqu’à oblitérer toute figure. Il a ensuite réagencé méticuleusement ces confettis, à la manière d’un horloger suisse, pour reconstituer des séquences cohérentes plastiquement, en termes de couleur, de texture, de facture et de continuité graphique. Et non seulement, on peut percevoir la source de ces échantillons atomisés de bande dessinée classique, mais il prend soin de raconter un récit sans figure, par le jeu des ambiances, où l’on traverse successivement des moments bouleversants, mélancoliques, apaisés et joyeux, et même un passage érotique* et une acmé dramatique. Au final, la bande dessinée classique fait retour, dès lors qu’on a reconnu le matériau de base (le geste des dessinateurs originaux), dès lors que ce matériau est recomposé pour former des atmosphères évocatrices, qui elles-mêmes forment une séquence narrative (le geste de Matthey) et que le tout est publié dans un 48CC (le geste des éditeur et imprimeur).

Né à Genève, Pascal Matthey vit et travaille à Bruxelles. D’inspiration autobiographique, ses livres à l’Employé du Moi puisent dans ses souvenirs suisses pour évoquer les joies et traumas contenus de l’enfance. Parallèlement, il explore sans relâche depuis 2001 les contrées sauvages de l’auto-édition au sein de la micro structure Habeas Corpus, aux commandes de fanzines aussi culte que révolus tels que Spouk the Dog, Soap comics ou We All Go Down.
* […] les pages «charnelles» ou «pseudo-pornographiques» n’établissent pas de lien direct avec des parties identifiées de l’anatomie humaine (ou d’un quelconque organisme), mais comme absolument tous les fragments semblent provenir de corps humains, avec leurs tons chair, leurs protubérances et leurs plis, le cerveau établit des connexions, peut-être d’une manière encore plus profonde et intense.
Pedro Moura in 978 de Pascal Matthey sur du 9.org.